TVA : Rien n’est acquis !
Posté par: lydie pinardi | on janvier 30, 2018
En principe, la TVA, que vous avez déduite ou non, lors de l’achat d’une immobilisation est définitivement actée.
Cependant, si vous cédez le bien acheté, vous pouvez être amené à faire des régularisations.
Ces régularisations vous concerneront :
- si vous vendez un bien immobilier dans la période de régularisation fiscale de 20 ans. Dans ce cas, vous pourriez avoir à faire un reversement de TVA au trésor public,
- si, lors de l’achat du bien, vous n’avez pas pu déduire de TVA en raison de l’exercice d’une activité exonérée, par exemple. Dans ce cas, il est possible que l’Etat vous autorise à en déduire une partie.
De plus, dans certains cas d’une vente faite à un assujetti à TVA, vous pourriez lui transmettre un droit à déduction.
TVA déduite : généralités
L’acquisition d’une immobilisation vous offre un droit à déduction de la TVA payée à votre fournisseur. Cette déduction dépend de plusieurs critères :
- Si l’activité de destination du bien est soumise à TVA,
- Si la loi n’exclut pas le droit à déduction sur le type de bien acheté,
- La détention de la preuve juridique conforme de votre achat (la facture du fournisseur).
Toutefois, dans certains cas la déduction, ou la non-déduction, peut être remise ultérieurement en question et faire l’objet d’une modification sur vos déclarations de TVA.
Question de période…
Pour que ces régularisations soient effectives, il faut tout d’abord savoir si votre bien acquis est dans la période de régularisation éventuelle.
- Le délai est de 20 ans pour les biens immeubles.
- Pour les autres immobilisations, dites meubles, le délai est de 5 ans.
Le raisonnement est réalisé par année civile, et non de date à date.
Le point de départ est l’année civile au cours de laquelle l’immobilisation a été acquise, importée, achevée, utilisée pour la première fois ou transférée entre secteurs d’activités, selon le cas.
L’année en question compte alors dans le calcul.
Exemple
Un véhicule acquis en Avril 2018 est dans la période de régularisation du 1er janvier 2018 au 31 Décembre 2022.
La TVA déduite remise en question
TVA initialement déduite : attention au reversement !
Principe
Vous avez déduit votre TVA à l’acquisition d’un bien immobilier. Vous revendez votre bien sans soumettre la vente à la TVA. Dans ce cas, l’administration fiscale vous demande de reverser une partie de la TVA que vous avez déduite à la base, en autant de 20ième que les années pour lesquelles vous n’avez plus l’utilisation de bien. Le principe est identique pour les meubles, avec un raisonnement en 5ième.
Cas fréquent
Précisément, ce cas se rencontre couramment lorsque vous avez acquis un immeuble neuf que vous revendez après 5 ans d’utilisation sans exercer l’option volontaire à TVA sur la vente.
Exemple
Votre entreprise achète en 2012 un immeuble neuf pour 1 000 000 euros HT sur lequel elle déduit 196 000 € de TVA (selon le taux en vigueur à l’époque).
Elle le revend en 2018, sans que la vente ne comporte de TVA.
Un reversement de TVA sera nécessaire, calculé comme suit : 196 000 € x 13/20 = 127 400 €.
Votre entreprise devra alors reverser au Trésor public 127 400 euros de TVA qu’elle avait légitimement déduite à l’acquisition.
Elle a conservé le bien 7 années civiles (de 2012 à 2018) sur les 20 ans de la période de régularisation.
Conseil particulier
Votre matériel ou outillage immobilisé a disparu dans les 5 ans suivant son acquisition.
Pour éviter d’avoir à reverser une fraction de la TVA déduite sur ce matériel ou outillage, soyez en mesure de justifier cette disparition par une mise au rebut, un incendie, un dépôt de plainte pour vol, etc… Dans ce cas, la sortie de l’immobilisation forcément non soumise à TVA est excusée…
Une TVA reversée mais pas perdue
Votre TVA reversée ne sera pas perdue si la vente se fait à une entreprise soumise à TVA.
Détails de la règle fiscale : pour les plus courageux !!
Un reversement de TVA ?
La régularisation de la TVA se traduit pour vous par un reversement au Trésor public d’une partie de la TVA que vous aviez déduite initialement.
Si vous revendez le bien à une entreprise elle-même assujettie à TVA, vous avez tout intérêt à transmettre un droit à déduction à votre acquéreur, sous la condition que la vente ne soit pas elle-même soumise à TVA.
Selon l’administration fiscale :
Sous réserve que le bien constitue également une immobilisation pour le bénéficiaire de la cession, de l’apport ou du transfert, celui-ci peut déduire une fraction du montant de la TVA ayant grevé initialement le bien, à proportion du rapport entre le nombre d’années restant à courir, pour le cédant ou l’apporteur, jusqu’au terme de la période de régularisation et le nombre d’années total de celle-ci (CGI, ann. II, art. 207, III-3).
Formalisme
À cette fin, le cédant ou l’apporteur délivre au bénéficiaire une attestation. En la circonstance, elle joue un rôle analogue à celui d’une facture, mentionnant le montant de la taxe que ce dernier est en droit de déduire.
L’attestation doit, en outre, comporter :
- l’identification (nom ou raison sociale, adresse) du cédant (ou de l’apporteur),
- l’identification (nom ou raison sociale, adresse) de l’acquéreur (ou du bénéficiaire de l’apport),
- la description sommaire des biens, et s’il y a lieu, leur numéro d’identification,
- la date d’acquisition des biens par le cédant ou l’acquéreur,
- la date de la cession ou de l’apport.
Autre cas similaire…
Si l’immeuble acquis n’a pas donné lieu à une déduction de TVA pour le vendeur assujetti, parce que ce dernier n’utilisait pas le bien pour une activité soumise à TVA, le droit à déduction peut être également transmis à l’acquéreur sur la période qui restait à courir dans la période de régularisation de 20 ans.
Attention, le nouveau droit à déduction génère pour l’acquéreur un nouveau délai de régularisation de 20 ans.
Exemple
Le vendeur a acquis le bien en 2010 pour 500 000 euros HT pour une activité de location nue à usage d’habitation. Il exerce donc une activité exonérée de TVA pour ce bien. Il n’a donc pas pu déduire à l’acquisition la TVA de 98 000 euros (taux en vigueur au moment donné de 19.6%).
La revente en 2018, à un professionnel assujetti, n’est pas soumise à TVA. L’acheteur destine ce bien à une activité soumise à TVA, comme un usage de bureau pour un architecte par exemple. Le vendeur peut alors fournir l’attestation mentionnée ci-dessus à l’acheteur. Cela permettra ainsi à ce professionnel de déduire la TVA alors « transmise ».
L’architecte peut alors déduire 98 000 x 11/20 = 53 900 euros de TVA . Cette somme entre dès lors dans une nouvelle période de possession du bien de 20 ans.
Notre conseil
Dans la mesure du possible, on préférera soumettre volontairement la vente à TVA. Cela permettra une déduction complémentaire pour le vendeur sur la période non utilisée dans le délai de régularisation. L’acheteur ne sera pas contrarié et pourra déduire la TVA sur son acquisition dans le cadre de son activité.
La TVA non déduite remise en question
À l’inverse, votre entreprise peut être amenée à pouvoir déduire une partie de la TVA qu’elle n’a pu déduire initialement.
Exemple 1
Par exemple, la TVA afférente à l’achat d’une voiture particulière par une entreprise n’est pas déductible. Le prix de revient réel correspond ainsi au prix TTC du véhicule. La vente d’un véhicule de tourisme par une entreprise à un négociant en biens d’occasion est, en principe, exonérée de TVA. Cependant l’administration tolère dans ce cas que l’entreprise cédante soumette optionnellement une telle vente à la TVA. Une régularisation sera alors également nécessaire, vous permettant cette fois de déduire une partie de la TVA que vous n’avez pas pu déduire à l’acquisition !
Concrètement, votre entreprise revend en 2018, pour 13 000 € HT (soit 15 600 € TTC avec 2 600 € de TVA collectée) un véhicule acquis en 2016 pour 24 000 € TTC (4 000 € de TVA non déduite). Trois années civiles sont concernées entre l’achat et la revente du véhicule. Votre entreprise peut déduire une fraction de la TVA initialement payée lors de l’achat sur les deux années restantes : 4 000 € x 2/5 = 1 600 €.
Exemple 2
Vous avez commencé votre activité en microentreprise et acheté pendant cette période un matériel de 1200 euros TTC en Avril 2016.
A l’époque vous n’avez pas pu récupérer la TVA du fait de votre statut appelé « franchise de base ». Si vous devenez soumis à TVA dans les 5 ans, par exemple en 2018, parce que vous avez dépassé les seuils légaux vous pouvez récupérer des 5èmes de TVA. Vous pourrez donc récupérer la TVA 3/5ème de 200€, soit 120€.
En bref…
Lorsqu’une immobilisation est cédée dans la période de régularisation (20 ans pour les immeubles et 5 ans pour les biens meubles), la TVA déduite ou non à l’acquisition peut être remise en question : TVA à reverser dans certains cas, ou complément de TVA à déduire dans d’autres…
Si l’option à TVA n’est pas exercée à la vente d’un immeuble, il est possible que la TVA non déduite sur le bien dans le temps restant à courir jusqu’au terme de la période de régularisation soit transmise à l’acquéreur assujetti. Un formalisme à remplir suffit pour que l’acheteur puisse exercer son droit à déduction pour les 20 ans à venir.